La vie d’un village à travers les siècles est d’autant plus difficile à explorer que, jusqu’à la Révolution de 1789, il n’a joui d’aucune autonomie, gouverné qu’il était par le chef-lieu. Ce n’est qu’un lieu-dit, d’où le magistrat tout puissant de la ville voisine tire hommes et subsides à volonté, et qui figure essentiellement sur les rôles de contributions et de levées de miliciens ou de pionniers. C’est donc parmi les milliers de documents des archives de Bourbourg, qu’il a fallu rechercher ce que fut Loon en ces temps reculés. Le triste XIXe siècle a vu renaître cette communauté qui, changeant de maîtres, n’en a pas pour autant trouvé la joie de vivre. Tombée des mains des privilégiés, en celles des possédants, elle est encore maintenue en sujétion jusqu’à ce que la République, si faible, si divisée, si imparfaite soit-elle, donne à chacun de ses hommes et de ses femmes un statut d’être humain à part entière et leur permette de s’épanouir, enfin, dans un cadre où, de jour en jour, il fait meilleur vivre et d’où la misère, compte tenu des douloureuses saignées de la guerre, a désormais été chassée. Le site côtier détruit, des centaines d’hectares d’un terrain dont on enviait la fertilité réduits à l’état de friche, de marécage, bouleversés, saccagés, où il ne reste des promesses du pouvoir que des baraques en ruines, des outils rouillés, témoins d’une guerre froide et du dédain des puissances d’argent pour ceux qui, des siècles durant, ont fait de cette terre le grenier de la Flandre : tout cela crée des problèmes qui sont loin d’être surmontés, et Loon aura encore - pendant longtemps - à s’en défendre. Mais ceci est une autre histoire...